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La loi PACTE (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) a été définitivement adoptée le 11 avril dernier avec un objectif prioritaire : stimuler l’innovation, en particulier dans les PME et les entreprises de tailles intermédiaires (ETI), considérées comme insuffisamment créatives. Alors que 6 grands groupes sur 10 déposent des brevets d’invention, ce n’est le cas que de 2 PME sur 10. Les PME allemandes sont quatre fois plus dynamiques que les françaises à cet égard.
Pour atteindre ses buts, la loi PACTE comprend des mesures d’ordre divers, avec notamment la création d’un fonds de 10 milliards d’euros pour soutenir les innovations de rupture. Elle facilite aussi les parcours des chercheurs d’organismes publics qui souhaitent rejoindre des entreprises privées. Mais l’un de ses volets les plus importants concerne la propriété intellectuelle.
Un brevet français plus fort et plus sûr
« La nouvelle loi institue un examen a priori du critère d’inventivité des brevets par l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) qui voit son rôle renforcé. On se rapproche ainsi du système allemand », explique Alexandra Mendoza-Caminade, professeur de droit des affaires, spécialiste de la propriété intellectuelle. Cela limite le risque pour une PME de déposer un brevet qui ne tiendrait pas face à l’action en justice d’une entreprise concurrente.
« L’objectif de cet examen a priori est de rendre le brevet français plus fort et plus sûr, d’un point de vue juridique », précise-t-elle.
La création d’une procédure d’opposition à une demande de brevet d’une autre firme constitue une autre nouveauté. « Avec ce dispositif, on vise toujours à rassurer les petites structures, mais cette fois, en leur montrant qu’elles peuvent bloquer un concurrent à coût raisonnable, dans des cas qui nécessitaient jusqu’à présent d’aller jusqu’au procès », estime la juriste.
Redorer l’image des petits brevets.
Le certificat d’utilité, aussi appelé petit brevet, est par ailleurs rénové. « Visant des innovations de cycle court, sa durée de 6 ans passe à 10 ans, ce qui lui permettra d’être utilisé dans de plus nombreuses circonstances », observe Alexandra Mendoza-Caminade.
« Le petit brevet ne nécessite pas l’établissement d’un rapport de recherche, ce qui rend son instruction rapide et peu onéreuse (une centaine d’euros seulement). Il pourra désormais, être éventuellement transformé en véritable brevet par la suite, opération qui était jusqu’à présent impossible », précise-t-elle.
Ces réformes garantissent, à priori, un accès facilité à l’innovation pour les petites entreprises, mais une inconnue demeure. En effet, la réussite de la réforme est conditionnée aux moyens financiers qui seront affectés -ou pas- à l’INPI pour mettre en œuvre ses nouveaux pouvoirs.
Selon la Cour des comptes, les moyens à mobiliser dans ce cadre seraient considérables. « Le risque, si des moyens suffisants ne sont pas alloués, serait finalement d’alourdir les procédures, car examiner l’inventivité d’une innovation va prendre du temps et nécessiter du personnel. Il ne faudrait pas, in fine, que ces réformes se retournent contre l’innovation et bloquent les mécanismes de protection », prévient Alexandra Mendoza Caminade, qui appelle à la vigilance.
Vice-Présidente chargée des Relations Internationales de l’université Toulouse Capitole, professeur des universités, rattachée au centre de droit des affaires (CDA), Alexandra Mendoza-Caminade dirige le Master 2 propriété intellectuelle. Elle est intervenue le 18 avril 2019 dans un colloque organisé à l’université Toulouse Capitole sur les effets de la loi PACTE sur les entreprises.
Alexandra Mendoza-Caminade travaille par ailleurs sur plusieurs autres thématiques, notamment le droit du médicament.
Sur lexradio : PACTE, une loi de simplification pour les entreprises, actes de colloque par Claire Serlooten, Maître de conférences, Université Toulouse Capitole et Mathilde Dols, Maître de conférences, Université de Montpellier
« Stimuler l’innovation : des mesures de propriété industrielle »,